Jeudi 11 mai 2023
Qu’est-ce qui distingue l’Europe des Etats-Unis en matière d’information ESG ? En voilà une bonne question ! Les pratiques sont-elles comparables ? Labrador suit cela bien évidemment de très près, au quotidien. C’est son métier. Une étude* comparative à paraître en septembre prochain permet de tirer de précieux enseignements sur les pratiques de chaque côté de l’Atlantique. Morceaux choisis.
Le constat de départ est que les entreprises américaines n’ont pas d’obligation, comme c’est le cas en Europe, et donc en France, de communiquer sur leurs engagements RSE. Résultat, les supports US sont d’une manière générale plus communicants, quand ceux du Vieux continent sont davantage dans le reporting. Notre information en la matière est plus mature et permet plus de comparabilité. La France a une dizaine d’années d’avance sur certains sujets. Toutefois, les lecteurs ont les mêmes besoins, les mêmes attentes, aux Etats-Unis comme en Europe, nous pouvons imaginer une convergence. Elle prendra peut-être un peu de temps, mais elle semble inévitable.
Des critères sociaux peu utilisés chez nous
Les Etats-Unis se distinguent aujourd’hui sur l’importance des indicateurs sociaux, avec des critères de mixité, de minorités et de genres bien moins sensibles et bien moins politiques en Europe. La SEC a demandé en mars 2022 aux entreprises américaines cotées d’intégrer dans leur document de référence (10-K) différentes informations directement liées aux enjeux climatiques. Ces dernières ne voient pas cela d’un bon œil.
En attendant, la quasi-totalité des entreprises américaines (96 %) publient bien un rapport ESG, incluant des informations sur leurs engagements environnementaux et climatiques, 100 % des entreprises américaines communiquent sur leurs émissions Scope 1 et 2 et 85 % sur leurs émissions scope 3 par exemple. Les entreprises françaises, cotées, quant à elles publient une Déclaration de performance extra-financière (DPEF) ou un chapitre RSE dans leur Rapport de gestion ou leur Document d’enregistrement universel (DEU) qui incluent des informations environnementales, sociales et sociétales. A noter, seules 49 % des entreprises françaises publient un rapport RSE en plus de cette information obligatoire.
Des similitudes et des différences
Côté similitudes, nous retrouvons ici et là-bas des documents plutôt communicants. Les photos et graphiques sont nombreux (37 photos en moyenne dans les rapports américains, contre 18 dans les rapports français). Les documents sont d’une façon générale assez longs (87 pages en moyenne pour les rapports américains, contre 78 pages en moyenne pour les rapports français), et structurés autour de 6 chapitres ou sections. L’information « sociale » occupe la plus grande partie des documents (une vingtaine de pages en moyenne des deux côtés de l’Atlantique), suivie par l’information environnementale (respectivement 19 pages pour les Etats-Unis et 17 pages pour la France). Les informations de gouvernance tiennent quant à elles sur moins de 10 pages dans les deux cas.
Une information plus communicante et plus digitale aux Etats-Unis
Côté différences, le format utilisé est plutôt adapté à une version digitale aux États-Unis (65 % des rapports sont au format à l’italienne), alors qu’en France la version dite « print » est largement représentée (86 % des rapports sont au format à la française). Presque tous les PdF sont interactifs aux États-Unis (98 %) alors qu’en France seuls 38 % le sont. Les rapports français se déclinent toutefois plus volontiers en format mini-site dédié (14 % contre 6 % aux Etats-Unis). Question disponibilité de l’information, celle-ci est mise à la disposition du public bien plus tôt en France qu’aux États-Unis : mi-mai, contre début juillet en moyenne. Enfin, si l’information ESG est plutôt concentrée aux États-Unis sur deux supports (Rapport ESG et Rapport climat), elle est bien plus diffuse en France. Le, ou plutôt les publics peuvent la retrouver dans les communiqués de presse des résultats annuels et les présentations investisseurs par exemple.
Etude à suivre
Sur quels indicateurs communiquent les entreprises de chaque côté de l’Atlantique ? Utilisent-elles des référentiels internationaux ? Quel niveau de précision dans l’information ? L’information est-elle vérifiée, comparable ? … L’intégralité de l’étude incluant l’analyse plus fine de l’information disponible dans les documents, en vue notamment de la CSRD qui concernera également à terme certaines filiales américaines implantées en Europe, sera publiée en septembre prochain. A suivre donc.
Beñat Caujolle
*Etude réalisée sur les 50 premières sociétés du S&P500 (côté US) et le SBF120 (côté France), sur la base de 75 critères.